J’écoute les chouettes
et je ne quitte pas des yeux cette lumière vespérale
qui s’amenuise, qui s’efface
et qui cède la place
à la profonde, à l’irrémédiable
nuit…
Les poèmes réunis dans le
présent recueil ont été écrits – pour
reprendre les propos de l’auteur, dans sa « langue du Sud
» (l’occitan) et dans sa « langue du Nord » (le
français). Les plus anciens furent inspirés par un
séjour que fit le poète au Portugal, il y aura
bientôt cinquante ans. Les autres ont été
composés entre 2000 et 2006. On y retrouve les thèmes
chers à Bernard Lesfargues : « l’amour de sa vieille
terre périgorde, l’amour toujours vif de la femme,
l’amitié, le temps qui s’essouffle et la mort qui
patiente. » Ce recueil serait-il des adieux poétiques au
monde d’ici-bas ? On pourrait le penser parfois, à lire
les nombreuses allusions à la mort. Mais tant parler de la mort
ne signifie-t-il pas encore et toujours un amour inextinguible de la
vie ?
Article de presse :
"Avec cette langue qui se rit des partitions,
l’occitan ; avec cet air qui nous enivre de souffles chauds et de
rires... Bernard Lesfargues a toujours vécu, existe, grâce
à ces mots et à leurs mélodies ; il est
créateur de mots, de mélodies, un des plus importants
créateurs de chants occitans — à l’instar du
« canso » ou du « planh » des troubadours.
D'ailleurs, est-ce un hasard si « un rossignol (qui) dans la nuit
claire chantait » lui fait penser à Richard Cœur de
Lion ? Poème récent inclus dans la deuxième partie
de l'ouvrage intitulée
« Lumière dans l’obscurité » avec des
textes d'une pureté qui a la richesse du silence quand, ouvert
au temps, on jouit de ses rêves :
« Un silence plein de lumière / que
dévoile une mésange / c'en est assez pour qu'un ange /
s'en vienne sur cette terre / écouter les battements / à
l'unisson du cœur des hommes. »
Ecoutez encore :
« Je reviendrai à Ganagobie / par un
soleil comme un lézard, / j'y reviendrai un jour de vent /
balayant la plaine de la Durance, / nous y reviendrons, / nous nous
rappellerons le temps / où nous étions amoureux. Je
fermais / ta main dans la mienne, je te disais... »
II nous chante aussi le Périgord, sa terre, le temps, la femme...
Quant à la première partie, « La
plus close nuit », elle a été composée au
Portugal il y a environ 50 ans : « J'ai placé ces
poèmes sous l'invocation de Supervielle. Que m'importe si de ce
fait on m'estime vieux jeu. Vieux jeu ?
« Le village de rencoquille, / écoute
et s'étonne / d'entendre l'océan du ciel / battre dans
son oreille ».
Bernard Lesfargues est né en 1924 ; parfois il pense à la mort :
« La mort est là qui vous fait signe /
tout doucement comme une amie. / Elle n'est pas gênante, non, /
mais elle est là qui vous épie / lisant par-dessus votre
épaule / devinant les mots qui vont suivre / pressentant ceux
que vous tairez. »
Ainsi de suite jusqu'à l'enchantement...
Alain Lacouchie
Revue Friches, Hiver 2006-2007