Max Rouquette


Poèmas de pròsa / Poèmes en prose


poèmes traduits de l'occitan par
Philippe Gardy et Jean-Guilhem Rouquette

édition bilingue occitan-français

144 pages
Prix : 15,00 euros
ISBN : 978-2-85792-180-6

Le Livre

     Cette paix séculaire. Cette paix de mille ans. Et même plus. Qui se berce doucement dans la vague molle. Qui se réchauffe au matin. Qui s’assoupit à la torpeur de l’après-midi. Et qui écoute, la nuit, dans les pins, chanter le rossignol et les cris des paons réveillés. Réveillés par l’antique peur descendue au long des siècles dans leurs veines. Celle de toute l’espèce, dans les vallées du temps. Et qui n’oublie pas de se réveiller chaque nuit.
    Cette paix de Maguelone, où l’enfant de la nuit joue à faire glisser le sable dans sa paume. Comme s’il était, lui, le sablier de l’histoire.
 
    Écrits pour la plupart entre 2000 et 2005 (date de la mort de l’écrivain), ces Poèmes en prose commencent presque toujours comme des notes jetées sur la papier, mais ils se transforment aussitôt en tableaux vertigineux, dont les perspectives, à peine suggérées, ouvrent grand sur les mystères et les enchantements d’un monde dont on ne soupçonnait guère l’existence, et plus encore la présence, invisible mais bien réelle, à nos côtés. Rouquette, comme dans le reste de son œuvre, est ici un incomparable déchiffreur. Ses capacités à comprendre le secret des choses et des êtres autour de lui se transforment immédiatement en images et en musiques qui nous mettent de plain-pied avec ce qu’il a vu et ressenti, et dont il a su restituer la force et la profondeur.


Article de presse :

                                            Rouquette au Paradis
 
    Mort en 2005 à 96 ans, sec et ridé comme un vieux Comanche, Max Rouquette est un géant de l’ombre des lettres françaises. Pour avoir écrit toute sa vie en occitan (se traduisant ensuite souvent lui-même), il s’est privé d’une gloire à sa mesure comme l’a souligné Raphaël Confiant du Monde : “Quel lecteur français moyen connaît le nom de Max Rouquette et sait qu’il a construit l’une des œuvres les plus accomplies de la littérature hexagonale du XXe siècle ? Il avait, certes, l’immense tort d’avoir écrit en occitan.” Bien qu’entré au répertoire de la Comédie-Française, bien que les Amandiers de Nanterre aient présenté une superbe version burkinabée de sa Médée, on se souviendra de la fierté d’airain dont il témoignait depuis sa douloureuse solitude. À l’occasion du centenaire de sa naissance : toute une série de parutions. Dont celle-ci : Poèmes en prose, pour la plupart des inédits.
 
                   Que la vie me quitte et que s’apaise le mouvement chaud de la chair
 
    Et dès les premières lignes, l’entrée dans un monde. En guise d’avertissement. une adresse destinée à désarmer le lecteur rationnel : “l’essence de la poésie est rebelle à tout discours. Quand elle le sent, elle se dérobe.” Un monde enchanteur s’ouvre, des sons, tout y vibre, et les mots-clefs de Max Rouquette tournoient dans un espace singulier, beau et inquiétant : “souffle”, “paradis”, “herbe”, “éternité”. Max Rouquette est un enfant devenu poète pour continuer à gambader ébloui dans la nature de son pays natal vers Argelliers. De continuer à réanimer ce monde parfait de l’enfance : “Et les pierres nous étaient douces. Sans mot dire après cent mille ans. Conscientes de tout leur être. Et très sûres de leur mission.” Et très vite la question de la mort, qui côtoie ouvertement la vie. On a souvent dit de Rouquette qu’il était noir ou pessimiste tandis qu’il parlait en poète de la continuité de la vie. “Que la vie me quitte et que s’apaise le mouvement chaud de la chair et que, dans l’éternité qu’elle me cachait, je vous trouve étoiles noires du silence, dans mon regard, une fois encore.”
 
                                                                         Valérie Hernandez
                                                                         La Gazette de Montpellier, n°1050