Je m’enfonce à
l’assaut de l’être inconnaissable dont je
ne sais rien dire qui ne soit pas totalement des mots. Est-ce donc ce
dieu-là dont j’ai soif ? Il me fallait un dieu
planté au bout de ce désert comme un arbre. Il me
fallait un dieu qui fût un arbre, les bras ouverts et tout
chargé de fruits. Il me fallait un dieu qu’on
pût toucher, sentir et voir ; que le vent des paroles se joue
à ses feuillages ; un dieu qui tienne dans le sol, les
ongles accrochés aux roches, les pieds abondants de chair et
de sève ; je lui veux des racines, de
l’écorce, je veux qu’il transforme
lui-même à son ombre ce qui n’est pas en
ce qui est, je veux que toute abondante source coule de lui plus
sûrement que les moissons sortent de terre ; et que ce ne
soit pas seulement en image que la tige jaillisse de graines
semées. |